Le chemin, qui portait deux noms suivant la façon dont on l’abordait, faisait 1 192 mètres très exactement. C’est ce qui était écrit à ce que l’on pouvait appeler son extrémité. Ce fut sa première caractérisation.
Mais en réalité, à ce point précis, au 1192, il se prolongea de deux façons, une officielle et une autre privée.
Marche arrière.
Le chemin, qui en son début, à gauche, s’empêchait par une barrière métallique d’un mètre vingt de haut ou ce que l’on pourrait aussi appeler un parapet de tomber, de plonger dans ce qui fut il y a une vingtaine d’années, un torrent de boue ou une coulée d’eau ruisselante. Ce dernier est devenu un chemin herbeux – attention, ne pas l’utiliser par temps de pluie violente ou d’orage, la nature peut se révolter – D’ailleurs, une violente dernière pluie y déposa dans son lit quelques gravats venus de terrains surplombants et une grande coulée de sable. De sable ou de terre.
Le chemin, qui aurait pu aussi s’appeler route, jusqu’’à son numéro 590 avant qu’un virage ne se dessina vers la droite, se rétrécit soudainement. De deux véhicules pouvant se croiser, sans risque d’accrochage, un seul pourra passer. Priorité à celui qui monte sauf si celui qui descend doit faire une trop longue marche arrière. Mais s’il est le mal-aimé du lieu, le chemin le poussait à reculer.
Le chemin, qui serpentait vers la colline lointaine, disparaissant de la vue de son emprunteur, au gré des méandres de son goudron ne semblait plus finir de monter. Une légère courbe, un faux plat, un dos d’âne, un nouveau faux plat et là surgit un double dos d’âne comme pour prévenir qu’il devait se mériter. Des jambes musclées et alertes, des coups de pédale rageurs, des bâtons de marche, tous voulaient le mater mais il ne se laissa pas faire et leur réserva quelques surprises. 1 192 mètres, petite longueur mais grande volonté de faire souffrir.
Le chemin, qui voulait être mérité, se prélassait mais douchait les enthousiasmes…